samedi 22 juillet 2017

Chester Bennington

Avant sa mort je ne connaissais pas son nom. J'ai dû vérifier lequel des deux chanteurs de Linkin Park s'était suicidé. Je n'avais jamais écouté un de leurs albums en entier. Au début des années 2000 j'adorais le neo-metal mais pas eux, parce que je les jugeais trop commerciaux. Pourtant, le plaisir coupable à chaque fois qu'un de leurs tubes passait dans l'auto-radio, plaisir conservé année après année. Sur twitter, j'ai lu des souvenirs d'adolescentes de l'époque qui se cachaient pour les écouter parce que leur entourage se moquait d'elle. Depuis deux jours, on a l'impression que ce groupe faisait partie de la vie cachée d'une grande partie d'entre nous, et que malgré les millions de disques vendus ils sont toujours restés tricards, pas assez ceci ou trop cela. Jusqu'au Hellfest dernièrement où ils se sont fait traités de "vendus" et ont été sommés de changer leur setlist...



Ses paroles dépressives étaient vraies finalement, confirmant l'adage sur les chansons que dit Fanny Ardant dans La Femme d'à-côté et dans For this is my body: les chansons disent la vérité, et plus elles sont bêtes plus elles sont vraies. C'est donc ça qui nous accroche à "Numb" ou "In the end": le désespoir adolescent, il ne faisait pas que le singer, il le vivait et on l'entendait...

Il n'est pas mort pour que des quarantenaires massacrent ses chansons la larme à l'oeil en pensant à leur jeunesse enfuie, mais il a vécu pour écrire une partie de la bande son d'une époque absurde et d'une génération perdue entre des restes d'idéologies qu'on a toutes vues se planter et l'égoïsme sans avenir érigé en mode de vie.

Je le connaissais très peu, je n'aimais pas beaucoup sa musique, mais au sein du peuple des célébrités qui nous accompagne depuis l'enfance et qui se transforme peu à peu en cimetière, sa mort me rend très triste.

dimanche 15 janvier 2017

Sabrina et la liberté

J'ai repris "Summertime Love" de Sabrina, plus connue sous le titre "Boys boys boys". Ma reprise: https://soundcloud.com/amyviolet_sings/les-garcons-sabrinas-summertime-love-coveradaptation.
Je me suis rendue compte un jour que je fredonnais la mélodie de la phrase "Everybody, summertime love, you'll remember me" sans me rappeler des mots ni de quelle chanson elle était tirée. C'est juste une très jolie mélodie.

Quand je me suis rappelé de quelle chanson cette phrase était issue, j'ai vu la reprise comme un défi, parce que c'est une chanson très légère, voire insignifiante, avec une légère réputation sulfureuse du fait d'avoir été le premier clip censuré par MTV, comme le rappelle Wikipedia.
D'autre part j'ai toujours l'envie de traduire les chansons anglaises vers le français. M qui s'y est essayé notamment pour "Close to me" des Cure disait dans une interview que cette démarche était proche de celle des yé-yé, et c'est quelque chose qui m'attire parce qu'il y a le défi de relever la difficulté de la traduction, la transmission de ce que représente la chanson en anglais pour soi-même, et la mise en accessibilité d'un texte incompréhensible pour certains.
Je trouve que c'est une façon d'exprimer des choses personnelles en ayant pour contrainte d'être fidèle aux mots des autres. Je m'y suis essayée sur "Wicked Game" de Chris Isaak déjà.
Concernant "Summertime Love", le clip sexy pour l'époque a énormément marqué les esprits, ce qui fait que plusieurs autres personnes ont déjà tenté la reprise décalée. J'ai trouvé ce monsieur très touchant avec ses chaussettes dépareillées ou cette jeune fille mélancolique et bien plus virtuose que moi.
À peine avais-je posté ma reprise sur Framasphere que je vois dans ma timeline un homme partager le clip (sans rapport avec ma reprise) avec un commentaire ironique "tout petit déjà ça me fascinait!" et bien sûr il parle des seins de Sabrina.
Ça m'a fait réfléchir parce que moi aussi, j'avais 7 ans et le clip me fascinait. Mais ce n'était pas pour la même raison bien sûr...
En y pensant je crois bien que ce qui m'attirait était le fait que Sabrina passait son temps à rajuster son maillot de bain sans en être gênée. Quand on est une petite fille à partir d'un certain âge on se met à être hyper attentive à son habillement, rien ne doit dépasser, rien ne doit laisser prise ni aux moqueries ni à l'intérêt trop appuyé des garçons. Le choix du maillot de bain, l'épreuve de la première sortie du vestiaire en situation, tous les endroits échancrés auxquels il faut faire attention ; sans être non plus trop couvrant pour ne pas être traitée de mémère ; et puis quand même recueillir l'approbation de sa mère, "c'est joli comme ça", arriver à se plaire à soi-même un minimum dans le miroir...Une équation quasi impossible.
Or dans ce clip on voit une fille qui n'en a rien à foutre de tout ça. Elle a mis un maillot trop petit, on voit des bouts de corps qu'on "ne devrait pas" voir et ça ne l'empêche pas de s'amuser, au lieu de sortir précipitamment de l'eau, s'enrouler dans sa serviette et ne jamais remettre le maillot infamant.
D'ailleurs j'avais oublié et je m'en suis souvenue en revoyant le clip, il y a cette scène où les garçons la matent dans la cabine de plage (la terreur des filles au collège étant d'être matée aux toilettes, comme les portes ne sont pas pleines -en tout cas à mon époque et dans mon collège) et où elle n'en a strictement rien à foutre. Une telle attitude est franchement désirable quand on sait très bien qu'on en serait mortifiée pendant plusieurs mois si cela nous arrivait.
Un positionnement féministe probablement non voulu par les auteurs du clip, mais fascinant pour les petites filles de l'époque, je suppose. Comme pouvaient l'être les provocations de Madonna ou le personnage Vivian dans Pretty Woman: les filles qui font des choses qu'elles ne devraient pas faire, et qui ne sont pas punies pour ça.